Journées de réflexion sur « le positionnement stratégique de la Tunisie »

Tunis 15-17 novembre 2022

Le Conseil Tunisien des Relations Internationales (CTRI) a organisé en partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer Stiftung la première édition des journées de réflexion sur « le positionnement stratégique de la Tunisie », tenues du 15 au 17 novembre 2022 à Tunis.

Ces journées ont été réparties comme suit :

  • 15.11.2022, diner d’ouverture et allocutions de bienvenue
  • 16.11.2022, panel 1 « géopolitique » et panel 2 « géo économie » ;
  • 17.11.2022, panel 3 « énergie, eau et climat » et panel 4 « sécurité ».

Elles se sont déroulées sous un format fermé dans le cadre d’une conférence ayant un modérateur, des panelistes et un débat. 80 invités ont pris part à cet événement dont les membres du CTRI, des universitaires, des diplomates, des journalistes, des hommes d’affaires et des anciens militaires  ainsi que des étudiants chercheurs, tous exerçant ou ayant exercé dans le domaine des relations internationales.

L’objectif principal de l’évènement consistait à réfléchir sur l’évolution de l’environnement régional et international de la Tunisie et l’indispensable repositionnement stratégique de notre pays pour mieux servir ses intérêts stratégiques,  économiques et politiques et consolider sa transition politique.

Séance d’ouverture

15 novembre 2022 

Lors de la séance d’ouverture, M. Khemaies JHINAOUI, Président du Conseil Tunisien des Relations Internationales a indiqué qu’avec l’organisation de ces premières journées de réflexion sur le « Positionnement stratégique de la Tunisie », le CTRI entame un exercice exaltant sur la place de la Tunisie dans le monde, les multiples défis auxquels elle continue à faire face après une dizaine d’années de transition tumultueuse et difficile. Il ajoute qu’ « alors que nous continuons de nous embourber dans nos difficultés internes, le monde autour de nous poursuit sa mutation à un rythme sans précédent ». Nous vivons aujourd’hui, dit-il, des changements rapides et radicaux dans notre espace géostratégique et dans l’ordre mondial, hérité de la guerre froide.

Face à la complexité de l’environnement international, à la compétition effrénée entre les Nations et aux risques réels de marginalisation qu’encourent les pays instables et peu enclavés aux changements, la Tunisie est appelée à reconsidérer profondément et urgemment ses politiques intérieures et extérieures, la manière et le rythme avec lesquels elle appréhende sa transition et son action à l’extérieur.

Prenant la parole M. Malte Gaier, Représentant de la Konrad Adenauer Stiftung ( KAS) à Tunis, a donné un aperçu sur les activités de la Fondation allemande en Tunisie .

Il a réitéré le soutien de la KAS au CTRI soulignant la pertinence des thèmes choisis pour les premières journées de réflexion sur « le positionnement stratégique de la Tunisie ». Il a indiqué que le monde connaît effectivement des mutations profondes qui méritent d’être  observées et analysées par des think tanks tunisiens à l’instar du CTRI. Il a enfin affirmé la disposition de sa Fondation d’accompagner cette réflexion et de s’associer aux étapes ultérieures de son développement

Le Député du Bundestag Allemand M. Manfred Grund en visite de travail en Tunisie, a souligné l’importance du partenariat entre l’Allemagne et la Tunisie pour le renforcement de la paix et la stabilité dans un monde en perpétuel mouvement.

M. Moncef Baati, membre du Comité Directeurs du CTRI a ouvert les travaux par une brève allocution présentant la thématique de l’événement et son déroulement pendant les journées 16-17 novembre 2022.

Professeur Abdelaziz Kacem a donnéune conférencesur « la culture, levier stratégique ».

16 novembre 2022 :

Panel 1 « Géopolitique »

  • Modérateur : M. Radhi MEDDEB
  • Panelistes : M. Ahmed OUNAIES, M. Hakim KAROUI, Mme Sophie BESSIS, M. Karim BEN KAHLA, Mme Hajer GUELDICHE, M. Abdessalem BEN AYED

Dans un contexte mondial caractérisé par une montée du populisme et des crises économiques majeures bouleversant l’ordre régnant, il est nécessaire aujourd’hui de s’interroger sur le positionnement stratégique de la Tunisie.

La Tunisie n’a pas réussi à capitaliser suffisamment sur le rayonnement international que la révolution a engendré et a enregistré une dégradation progressive de ses équilibres économiques et financiers, accentuant ainsi sa dépendance à l’égard de ses partenaires et voisins.

Longtemps cultivé sous le régime de Bourguiba, le rôle diplomatique de la Tunisie en tant qu’appoint au développement économique du pays, s’essouffle, faisant craindre un isolement et un retard de développement comparé à d’autres nations.

La détermination de la position géopolitique de la Tunisie porte sur trois axes stratégiques principaux :

Le premier est la région du Maghreb. A ce niveau, les panélistes ont relevé l’échec des tentatives d’intégration maghrébine et le coût du non-Maghreb. Une redéfinition réaliste et pragmatique de cet espace économique et culturel s’impose.

Il est aussi impératif de s’interroger sur le pôle auquel la Tunisie devra s’attacher. Bien qu’elle ait su développer une alliance forte avec le camp occidental, la Tunisie devrait aujourd’hui réfléchir à rééquilibrer ses choix dans un contexte mondial radicalement différent de celui de la guerre froide.

Membre fondateur de l’Organisation de l’Unité Africaine et acteur important sur le continent au cours des premières décennies de l’indépendance, la Tunisie semble avoir négligé cet espace stratégique. La faiblesse de la représentation diplomatique dans le continent et l’absence de projets majeurs de partenariat avec les pays africains illustrent ce recul de la dimension africaine de la diplomatie tunisienne.

Les panélistes ont souligné l’émergence de l’Asie en tant que pôle essentiel sur l’échiquier mondial et la nécessité pour la Tunisie de l’intégrer dans sa quête de repositionnement.

Panel 2 « Géoéconomie »

  • Modérateur : M. Mustapha Kamel NABLI
  • Speakers: M. Afif CHELBI, M. Mondher GARGOURI, M. Jalloul AYED, M. Ahmed EL KARM, M. Faouzi ELLOUMI, M. Salah HANNACHI

Face à la complexité grandissante de l’environnement international et à l’accentuation de la compétition entre les nations, les panélistes ont souligné la nécessité pour la Tunisie d’affirmer une vision stratégique à long terme prenant en compte les mutations actuelles et les défis à venir, qu’ils soient d’ordre interne ou externe.

A l’échelle nationale, les freins au développement ont été au centre de la réflexion et l’omniprésence de l’Etat a été particulièrement soulignée, à côté de l’inefficience du « contrat social » défini depuis les années soixante et de l’absence d’une réelle politique de développement régional.

L’investissement direct étranger (IDE) et l’exportation ont été identifiés comme moteurs essentiels de la croissance en Tunisie pour les décennies à venir. Les législations actuelles en matière d’encouragement aux IDE sont obsolètes et nécessitent une refonte en profondeur. Quant aux exportations, le marché européen continue d’offrir un potentiel important pas encore convenablement exploité par les opérateurs tunisiens.

Tout en préservant son partenariat stratégique avec l’Union Européenne (premier marché-export), la Tunisie est tenue – par le biais de la diplomatie économique – d’élargir sa sphère commerciale et de conquérir d’autres marchés à fort potentiel de croissance, particulièrement en Asie et en Afrique.

17 novembre 2022

Panel 3 – Energie, Eau & Climat

Modératrice : Mme. Amel MAKHLOUF

  • Panelistes: M. Khaled KADDOUR. M. Mohamed ENNABLI, M. Mustapha HADDAD, M. Néjib OSMAN.

Les questions d’énergie, d’eau et de climat préoccupent l’humanité plus que jamais. De l’avis unanime des panélistes, elles se posent avec acuité pour la Tunisie et constituent un des fondements de toute réflexion sur son positionnement stratégique. La Tunisie devra faire face aux conséquences du changement climatique. L’eau et les nouvelles formes d’énergie seront déterminantes pour un développement durable. La transition écologique et énergétique nécessite tout autant une vision de la position de la Tunisie qu’une stratégie et une gouvernance basées sur la situation en interne et en externe.

Face à une sécurité énergétique de plus en plus menacée et un doublement du déficit énergétique durant des dix dernières années, une vision stratégique et une volonté politique forte sont nécessaires pour opérer les transitions énergétiques qui s’imposent, particulièrement basées sur les énergies propres et renouvelables.

Avec les changements climatiques, la question de l’eau et du déficit hydrique croissant est également préoccupante. Se situant dans une « Zone Aride », la Tunisie est directement impactée par ces changements croissants qui risquent de mener à une demande en eau supérieure à l’offre à l’horizon 2030. La gestion de l’eau est un acte politique majeur, car nécessitant une vision claire et ambitieuse ainsi qu’une stratégie proactive et une gestion intégrée de la ressource en eau : gestion de la demande, recyclage de l’eau, maitrise des fuites, mobilisation des crues.

Panel 4 – Sécurité

  • Modérateur : M. Moncef BAATI
  • Panelistes: Colonel Major Mahmoud MEZOUGHI. Colonel Major Moncer AMRI, M. Nabil SMIDA.

Dans un monde marqué par la multiplicité croissante des menaces et l’interaction entre plusieurs registres (sanitaire, économique, sécuritaire, etc.), les panélistes ont souligné l’impératif pour la Tunisie de repenser sa stratégie sécuritaire. Le pays devra se positionner pour se prémunir contre les menaces provenant de l’environnement géographique immédiat, notamment l’Afrique sub-saharienne et la Libye voisine, mais également des phénomènes mondiaux liés aux changements climatiques, à l’immigration et la montée du terrorisme et Dans un monde marqué par la multiplicité croissante des menaces et l’interaction entre plusieurs registres (sanitaire, économique, sécuritaire, etc.), les panélistes ont souligné l’impératif pour la Tunisie de repenser sa stratégie sécuritaire. Le pays devra se positionner pour se prémunir contre les menaces provenant de l’environnement géographique immédiat, notamment l’Afrique sub-saharienne et la Libye voisine, mais également des phénomènes mondiaux liés aux changements climatiques, à l’immigration et la montée du terrorisme et de la violence. En effet la position géographique de la Tunisie entre l’Afrique et l’Europe d’unepart et à mi-distance entre la Méditerranée occidentale et la Méditerranéeorientale, d’autre part, lui donne des avantages certains sur les plansstratégiques et économiques mais lui causent des problèmes sur le plansécuritaire. La proximité avec l’Europe et son ouverture sur la mer faitd’elle un point de passage vers l’Europe des trafiquants et des migrants.

A côté de ces menaces conventionnelles, il y a lieu de considérer également les nouvelles menaces liées au cyberespace et d’intégrer la cyber-sécurité dans la stratégie sécuritaire du pays.

La stratégie sécuritaire de la Tunisie devra s’appuyer sur une volonté politique claire et forte. Elle passe également par la valorisation des instances en charge de la question, tel que le Conseil National de Sécurité et le Centre National des Renseignements.

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